Nous nous préparions tranquillement. Nous : Iris, Mélodie et Charlotte, une petite moitié de la joyeuse collective que j’organisais ce soir-là. « Qui veut des crampons, qui veut un ARVA, qui n’a pas de baudrier… ? » On se croirait en plein milieu d’un souk, la foule en moins !
Chacun était bientôt à peu près équipé pour pouvoir franchir la barrière, celle qui ouvre les portes du monde d’en haut. Mais une bonne partie de la troupe était encore aux abonnés absents.
Tout à coup, coup de fil de Sylvie : « on vient de nous dire que la dernière benne part dans 5mn » « QUOI?!, c’est quoi ce délire ?! J’avais pourtant bien checké, j’étais persuadé qu’elle était à 16h45 ! Allez-y ! (et dans ma tête : qui est déjà là-bas, qui est absent?), on vous rejoint ! ». Évidemment, le premier réflexe consiste à s’en remettre à la faute d’autrui. La CMB évidemment, que l’on cible régulièrement comme la cause de tous nos maux. Mais la complainte devait ici s’arrêter à l’orée d’une réalité emprunte de modernisme : oui, il va falloir accélérer, devenir efficace, efficient, performant, productif…
Pas le temps de ruminer davantage, moi qui me félicitait un instant plus tôt de l’avance que nous avions, de laquelle nous pouvions jouir, et de cette organisation qui semblait huilée.
Branle bas le combat, tel un vendeur à la sauvette, l’étalage est rangé en une fraction de secondes, et nous voilà bientôt en train de sprinter en direction de la benne. Décidément, j’aime Chamonix ! Un peu plus tard, nous parlerons d’Afrique, de Tchad et d’un rapport au temps bien différent. C’est décidé, une fois au sommet de l’Aiguille, nous faisons notre cette maxime qui fait la trame de vie de ces sociétés-là : « tu ne sais ni quand tu pars, ni quand tu arrives ». Nous allons trainer, ralentir, et surtout, prendre la mesure de l’instant présent !